Festival d'Avignon 2012 - L'Ile des Esclaves

Publié le par Festival Off - Montfavet en Avignon

B14

La comédie en un acte (11 scènes) de Marivaux est marquée par un thème sociopolitique : la critique de l'ordre social et de la hiérarchie religieuse. Elle s'inscrit à la fois dans le théâtre de Marivaux - avec le jeu du travestissement et le thème de l'amour - et dans la pensée du 18°s.

Les personnages principaux :


- Iphicrate, général athénien. En grec, son prénom renvoie à son ordre social et signifie celui qui gouverne par la force.

- Arlequin, esclave d'Iphicrate. C'est un personnage célèbre de la commedia dell'arte. Son ton est très familier. Dans la pièce, il change momentanément de statut pour devenir le maître d'Iphicrate. Peu rancunier, il pardonne ses excès à son maître. Pour lui, rien ne porte à conséquences.

- Euphrosine, dame athénienne. Comme Arlequin, elle est issue de la Commmedia dell'arte. C'est la maîtresse de Cléanthis. Coquette et de mauvaise foi, elle refuse de reconnaître ses défauts à Trivelin.

- Cléanthis, esclave d'Euphrosine et maîtresse d'Arlequin. Rancunière, elle profite de son renversement de statut pour assouvir sa vengeance et refuse d'abord de rendre son statut de maître.

- Trivelin, gouverneur de l'île. Il s'agit d'un ancien esclave, qui a supprimé les maîtres à son arrivée sur l'île par désir de vengeance. Dans la pièce il est compatissant envers les maîtres durant la passation de pouvoirs.

 

"Vous avez été leurs maîtres,
et vous avez mal agi ;
ils sont devenus les vôtres et ils vous pardonnent ;
faites vos réflexions là-dessus.
La différence des conditions n’est qu’une épreuve
que les dieux font sur nous." (Arlequin)

"Il ne vous fera pas de révérences penchées ;
vous ne lui trouverez point de contenance ridicule,

d’airs évaporés : ce n’est point une tête légère,
un petit badin, un petit perfide,

un joli volage, un aimable indiscret ; ce n’est point tout cela ;
ces grâces-là lui manquent à la vérité ;

ce n’est qu’un homme franc, qu’un homme simple dans ses manières,
qui n’a pas l’esprit de se donner

des airs ; qui vous dira qu’il vous aime,
seulement parce que cela sera vrai ;

enfin ce n’est qu’un bon cœur, voilà tout ;
et cela est fâcheux, cela ne pique point." (Cléanthis)

Les grands thèmes :

- L'utopie : L'île des esclaves est une utopie sociale qui rappelle le motif de l'île paradisiaque de Thomas More. Dans L'utopie, l'écrivain y décrit un endroit où les hommes vivent en harmonie, sans conflits d'intérêts ni injustices. Bien sûr, il s'agit d'un mythe qui n'a rien de réel. D'ailleurs, une utopie signifie « endroit qui n'existe nulle part » étymologiquement. L'île des esclaves est une utopie en ceci qu'il propose une inversion des rôles esclaves-maîtres, possible nulle part ailleurs. Cependant, il n'abolit pas le concept de la servitude. Ce n'est donc pas un monde idéal que nous propose Marivaux, mais un exemple de société qui présente un nouvel ordre social au rapport de domination inversée.

- La relation maîtres / valets : figure emblématique du valet, Arlequin fait l'expérience d'un statut de dominant en devenant le maître d'Iphicrate. Cette inversion des pouvoirs constitue le nœud dramatique de la pièce de Marivaux. C'est une véritable remise en cause de l'ordre établi.

- L'amour : c'est un des thèmes favoris de Marivaux. On parle d'ailleurs de marivaudage pour évoquer un échange de propos galants d'une grande finesse entre un homme et une femme qui sont dans le jeu de la séduction. Dans L'île des esclaves, on passe de la simple galanterie à une expression plus forte des sentiments.

- L'exotisme : ce n'est pas le thème le plus important, mais l'exotisme du décor (la mer, les rochers) rappelle le caractère transitoire et utopique de l'île. L'île renvoie aussi au goût du 18ème siècle pour l'exotisme, que l'on que l'on retrouve par exemple chez Voltaire ou Montesquieu.

 

A découvrir au Festival d'Avignon 2012, Cité Médiévale de Montfavet. Plus d'infos: http://montfavetleoff.com

Publié dans Le Programme 2012

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